Myriam Gagnon du magazine Vita nous raconte sa rencontre avec l’indomptable Mari-Jo Thério…
“On m’avait pourtant mise en garde: « Attention, elle est insaisissable.» La galère quand on a un portrait intimiste à écrire. Mais Marie-Jo Thério est aussi une charmeuse. Comme tant d’autres, j’ai été subjuguée par la présence hypnotique de celle qui mène sa carrière avec l’insolence des gens totalement libres.
Mélange de Meg Ryan et de Peter Pan, son visage enfantin contredit un tempérament de feu. «Jeanne d’Arc, c’est moi! Pour manœuvrer ta barque dans le monde de la musique, où les lois sont établies par des hommes, il faut être une guerrière doublée d’une fine psychologue.»
Sitôt arrivée au café, devant le Théâtre Corona, «l’insaisissable» a fixé les règles. Pas question d’interview vérité. Elle est là pour la promo de son album Chasing Lydie, point à la ligne. À l’argument que ses fans aimeraient connaître la femme derrière l’artiste dont les spectacles chamboulent l’âme, elle rétorque: «Ça leur donnerait quoi au juste de savoir le nom de mon amoureux, comment je vis mes 46 ans ou quel est mon resto favori?» Il ne me reste qu’à m’incliner, d’autant plus que ce projet est la grande affaire de sa vie.
Comment parler de Chasing Lydie sans trahir le souffle épique qui l’anime? Disons que l’aventure débute il y a une dizaine d’années, alors que Marie-Jo découvre sur un soixante-dix-huit tours la voix d’une grand-tante maternelle, chanteuse de cabaret dans la banlieue de Boston. Elle a eu envie de suivre sa trace à travers les familles des ancêtres acadiens émigrés aux États-Unis.
Le résultat de cette quête imaginaire a pris la forme d’un double album anglophone, un «road movie sonore» constitué de chansons, de pièces musicales, d’extraits de vinyle crachotant et de conversations, de bulletins météo, de chuintement de roues de train… Cette œuvre ne ressemble à rien d’autre, elle doit s’écouter d’une traite «un verre de vin à la main» et se situe délibérément hors des circuits commerciaux. En deux mots, elle conforte la réputation de Marie-Jo Thério, qui serait tout sauf reposante. «L’artiste a besoin d’être dans un espace exploratoire, pas dans le réconfort ni l’apaisement. Avec le temps, j’ai pris conscience que la confrontation, c’est ce qui me fait bouger.»
✖ L’aventure Chasing Lydie se poursuivra au cours de l’automne 2012 avec un concert à l’image de l’album, «un espace de cœur et d’abandon».
La version originale de ce billet a été publiée dans le numéro été 2011 du magazine Vita .
-Rim