Billet de Sylvie Poirier, rédactrice en chef de
Vita
Publié dans le numéro de Septembre 2010
Depuis quelques années, j’évite le plus possible les miroirs et autres surfaces réfléchissantes. Et lorsque j’ose me mirer, les lumières tamisées comme toujours (aucun danger d’être éblouie ou d’avoir des cataractes, chez moi), je scanne ma silhouette en omettant soigneusement les détails. Pourtant, dès que je me retrouve sous les néons au bureau ou dans une cabine d’essayage quelconque (il faudra m’expliquer un jour pourquoi l’éclairage y est tellement déprimant, à moins qu’il ne reflète la réalité…), mes cernes, mon teint gris, mes boutons, mes rides, mes sourcils échevelés, ma repousse archidue ne manquent pas de me sauter aux yeux.
Eh oui, c’est comme ça, dès que je me vois dans la glace, je ne peux m’empêcher de penser: «Il me faudrait un lifting du visage… euh… peut-être aussi du cou; et tiens, pourquoi pas du ventre. Et tant qu’à y être, je pourrais me faire remonter les cuisses, les bras, les fesses, les genoux, le dos… le moral! Deux ou trois injections par-ci par-là ne seraient pas un luxe. Un traitement au laser pour gommer les taches et les rides superficielles ne ferait pas de tort.» En fait, une combinaison de plongée serait plus appropriée… et plus économique.
Pourquoi nos petits (et moyens) défauts monopolisent-ils toute notre attention (la mienne, trop souvent)? Pourquoi sommes-nous si exigeantes et parfois intransigeantes quand il s’agit de notre apparence? Pourquoi, dès le réveil, se met-on en mode dévalorisation? Pourquoi cherchons-nous méthodiquement la petite bête molle? Notre cerveau serait-il aussi déformant que notre miroir? Ma boule de cristal ne me permet pas d’y voir clair.
Mais vous, chères lectrices, vous avez su répondre à ces questions. De toute évidence, vous avez cliqué sur notre sondage Les Québécoises aiment-elles leur corps? puisque vous avez été plus de 3000 à vous prononcer sur le site de Vita. Les résultats de vos réflexions ont été compilés, digérés, analysés, et vous sont dévoilés dans notre reportage publié dans le numéro de Septembre. Ce qui ne nous étonne pas? Notre légère tendance (mais lourde de contradictions) à être obnubilées par la minceur et la jeunesse. Ce qui vous surprendra peut-être? Après 40 ans, nous nous calmons côté obsessions. L’apparence compte toujours, mais nous nous soignons! Nous privilégions davantage le bienêtre, la santé, la sensualité. De quoi nous rasséréner et nous rassurer.
On y apprend aussi que les femmes dans la cinquantaine en ont assez de se regarder le nombril (gros, laid et vieux, bien sûr) et décident d’en finir une fois pour toutes avec la tyrannie du miroir. Ah bon? L’évidence, l’indulgence, que dis-je l’intelligence nous frapperait de plein fouet après 50 ans? La sagesse viendrait avant la sénilité? Je veux bien croire qu’avec l’âge je deviendrai plus bouddhiste que boudin, mais d’ici là, j’attends l’illumination.
Ciel, mes REER vont peut-être survivre au Botox. Je respire…