Un phénomène nouveau
Photo: Tirée du film The Graduate, 1967.
Rares sont les hommes qui, à l'âge des poussées d'acné et des hormones en ébullition, n'ont pas brûlé de désir pour une femme plus âgée. Si les relations entre hommes jeunes et femmes plus âgées étaient jadis éphémères et clandestines, un nouveau phénomène se dessine, et pas seulement chez les stars - un milieu où Cupidon se fiche de plus en plus de l'âge. Car les couples où madame est plus âgée que monsieur sont en hausse: aux États-Unis, selon une enquête réalisée en 2003 par l'American Association of Retired Persons (AARP), le tiers des femmes de 40 à 60 ans fréquenteraient des compagnons plus jeunes. Au Québec, l'écart entre une femme mûre et son prétendant de 10 ou même 15 ans son cadet n'étonne plus tellement.
«Aujourd'hui, les femmes de 40 ans et plus sont autonomes, dynamiques et sûres d'elles, affirme la psychologue Ann Bourget, spécialiste des relations de couple. Physiquement, elles paraissent plus jeunes parce qu'elles prennent soin d'elles: le vieillissement de la femme n'est plus aussi précoce qu'avant! Et elles ne veulent pas avoir pour compagnons des hommes qui ne les respectent pas ou qui se sentent en compétition avec elles. Chez les plus jeunes, par contre, ça fait partie de leur mentalité d'être sur le même pied d'égalité que leur partenaire. Désormais, les femmes ont le choix d'être avec un homme qui leur plaît, quel que soit son âge.»
Mais que leur trouvent-ils donc?
C'est en discutant cinéma et musique à la cafétéria de la maison d'édition où ils travaillent que Robert Pierre, 45 ans, et Dominique, 54 ans, se sont découvert des affinités intellectuelles. «Une fille cultivée, avec qui je pouvais discuter des films d'Éric Rohmer, c'était fantastique! s'exclame-t-il. Et puis je la trouvais très belle avec ses cheveux courts et argentés.»
Quand il a commencé à fréquenter Dominique, il y a six ans, Robert Pierre ne s'est pas pour autant senti comme un jeunot qui drague une femme d'expérience: «Tous les deux, on avait déjà vu neiger! Dominique avait deux grandes filles. De mon côté, j'étais seul depuis un moment, sans enfants, mais la différence d'âge n'était pas nouvelle pour moi, car j'avais vécu en couple auparavant avec une femme qui était elle aussi mon aînée d'une dizaine d'années.» S'est-il alors dit qu'il répétait un pattern?«Pas du tout. C'était un simple concours de circonstances... et Freud n'était pas au rendez-vous. Je n'ai jamais eu l'impression de chercher le sein maternel. Une mère, j'en ai déjà une, et Dominique n'a pas à ramasser mes chaussettes, je fais très bien ça tout seul!»
Pour le sexologue Claude Crépault, professeur associé à l'UQAM et auteur de l'essai Les fantasmes, l'érotisme et la sexualité (Odile Jacob), le fantasme de la femme mûre chez les jeunes hommes n'a rien à voir avec la recherche du sein maternel. Cela dit, la femme plus âgée serait perçue comme rassurante... et moins menaçante qu'une plus jeune.