La boulimie, un mal bien présent chez les plus de 40 ans
Affamées de minceur
Le Dr Howard Steiger, chef du PTA (
un programme sur les troubles de l'alimentation chez les adultes
) à l'Institut universitaire en santé mentale Douglas, reçoit chaque année des centaines de femmes comme Sylvie.
En ce qui concerne la boulimie, le Dr Steiger se montre inquiet. Une étude récente, chapeautée par son équipe et effectuée auprès de Montréalaises, démontre que la boulimie et l'hyperphagie boulimique1 touchent de plus en plus de gens et que la prévalence chez les femmes âgées de 40 ans et plus est alarmante.
«Dans le cas de la boulimie, il y a aussi une transmission génétique de certains traits de personnalité, comme l'impulsivité et l'instabilité, mais les pressions sociales jouent un rôle capital», affirme-t-il. Le spécialiste explique que, contrairement à la croyance populaire, la boulimie est davantage liée à la culture du paraître que l'anorexie. «Nous retrouvons plusieurs cas d'anorexie à travers l'histoire, mentionne-t-il. Par contre, la boulimie sévit surtout dans les pays où on met l'accent sur la minceur.»
Svelte, mais pas trop
Difficile d'échapper au culte de la minceur même après 40 ans et de cesser de croire que, pour être belle et en santé (et avoir un air de jeunesse éternelle), il faut être filiforme.
D'autant plus qu'on nous met en garde contre le surplus de poids qui nous guette, en particulier quand on atteint la préménopause ou la ménopause (fluctuations hormonales obligent). Selon le Dr Steiger, cette campagne contre l'obésité peut pousser certaines femmes à se rabattre sur des régimes amaigrissants. Or, plus on prive son corps de nourriture, plus il en réclame. Cette privation accroît le risque de déraper et, finalement, d'avaler quatre tablettes de chocolat d'un seul coup. «Les dangers de l'obésité sont réels. Cependant, plus on essaie d'encourager les gens à être minces, plus il y a de cas de boulimie. Le discours social devrait être pondéré afin d'éviter de créer un autre problème.»
Contrôler son corps
Pourquoi certaines femmes s'infligent-elles tant de souffrance?
Valérie Beauséjour, sexologue et coordonnatrice clinique à l'ANEB, tente une explication: «Certaines femmes vivent des épreuves qui engendrent un stress difficile à gérer: transformations du corps à cause de la ménopause, divorce, deuil, départ des enfants de la maison, stress professionnel important comme un changement de poste, etc. Pour se ressaisir, elles cherchent, consciemment ou non, à contrôler leur corps, donc à perdre du poids. Le trouble alimentaire devient alors un outil qui peut les aider, temporairement, à gérer leur stress.
1 L'hyperphagie boulimique se définit par des épisodes d'orgies alimentaires, mais sans comportements compensatoires comme les vomissements, la prise de laxatifs ou l'exercice excessif. Elle conduit souvent à l'obésité.