Le dernier espoir
Le dernier espoir
À Noël 2000, les enfants et moi avons décoré le sapin pendant que Pierre somnolait sur le divan. Jusque-là, la décoration du sapin avait toujours été une tradition familiale festive. Pas cette fois. La soirée s'est terminée autrement: j'ai enlevé mon alliance et je l'ai donnée à Pierre en lui disant de me la rendre seulement quand il serait prêt à s'engager à nouveau dans une relation avec moi. Trois semaines plus tard, nous étions assis face à face dans notre chambre et nous nous tenions les mains quand il a prononcé ces mots: «Tu vas devoir être forte...»
Je m'attendais à ce qu'il me parle de ses difficultés et j'étais absolument certaine qu'il allait me rendre mon alliance. Enfin, nous allions commencer un certain processus de guérison. Par contre, je n'avais pas prévu la phrase suivante: «Je suis gai et je crois que je vais te quitter.» Hum, pardon? Tu es quoi?!? Que veux-tu dire par «gai»? Ok, je comprends, mais... gai?
Dans mon journal intime, le lendemain: « C'est fini. L'heure a sonné. Il me quitte... Notre mariage devait avoir une fin heureuse, mais ce n'est pas le cas. Hier soir, nous avons parlé pendant des heures. Il est toujours mon meilleur ami, mais il ne peut plus être mon mari ».
La douleur qui a suivi cette déclaration a été immense. Non seulement j'avais tout perdu ce que j'avais d'un coup, mais je ne savais même plus si cette vie avait déjà existé. Pierre m'a dit qu'il avait toujours su qu'il était gai et qu'il m'avait épousée parce que j'étais son «salut», sa porte de sortie. Qu'est-ce que ça voulait dire? Comment avait-il pu m'aimer s'il désirait les hommes? Pensait-il à des hommes lorsqu'il me faisait l'amour? Quelle sorte de femme cela faisait-il de moi? Qu'avais-je fait de mal dans notre mariage? Et si je l'avais bien fait, aurait-il pu gérer son homosexualité d'une autre manière? Comment avais-je pu ignorer que mon mari était gai? Avais-je négligé quelques indices?
Mon mariage était terminé et mon mari était gai. Je n'avais jamais connu personne qui était homosexuel, mais comme il était mon meilleur ami, nous en avons parlé. Pas seulement ce soir-là, mais aussi au fil des semaines pendant que nous préparions notre séparation. J'avais mal de l'entendre me raconter sa vie, de voir son visage s'illuminer lorsqu'il me parlait des hommes qu'il avait rencontrés, de l'homme pour qui il me quittait et de la communauté qui l'accueillait. C'était un monde dont j'ignorais l'existence, mais mon mari l'avait lentement intégré depuis plus d'un an.