Un menuisier pas comme les autres…
Me voici dans une pièce d'une blancheur immaculée, tapissée de petites cases dans lesquelles s'entassent plans et maquettes de toutes sortes. Dans un coin, je remarque un amoncellement de panneaux de contreplaqué, de clous et de retailles de bois. Puis, au milieu des flamants roses en plastique, des modèles réduits de mobilier, des maquettes d'immeubles et des toupies, j'aperçois une femme qui joue de la scie ronde comme le ferait un ébéniste.
L'endroit me fait penser à l'atelier d'un bricoleur. Or, nous sommes au centre-ville de Montréal, au cœur du Centre canadien d'architecture (CCA). Plus exactement au deuxième sous-sol, là où les supports et accessoires de présentation des pièces exposées au musée sont conçus et fabriqués.
Le menuisier avec qui j'ai rendez-vous est une femme, toute menue. «On m'aide parfois à transporter les "deux-par-quatre" jusqu'à la table de coupe, mais je parviens à presque tout trimballer moi-même», explique Sylvie Laparé, technicienne aux installations, qui s'empresse d'excuser le fouillis des lieux: «On monte présentement une exposition sur l'architecte Will Alsop, et il reste très peu de temps pour tout terminer. Parfois, on doit faire des ajustements de dernière minute et, le jour de la première, on s'affaire encore autour des installations pendant que la conférence de presse se tient dans la pièce d'à côté.»
Le temps de déposer son indispensable ceinture porte-outils, elle enchaîne: «Contrairement aux gens qui visitent le musée, moi, je peux manipuler les œuvres. J'ai été formée pour ça.» Elle n'a pas encore eu la chance de toucher aux maquettes de Mies van der Rohe ou de Frank Gehry, «mais chaque fois que je tiens une esquisse ou un meuble d'un grand créateur, ça m'émeut», déclare la quinquagénaire.
Car ce boulot qu'elle apprécie tant, elle l'exerce depuis quatre ans seulement, après avoir décroché son diplôme de technicienne en muséologie au Collège Montmorency. «Ç'a été un énorme changement dans ma vie, dans celle de Richard, mon mari, et de nos trois enfants. Mais je ne regrette rien.»