Michelle Blanc : naître dans le «mauvais corps»
Être une femme
dans un corps d'homme, c'est moduler sans cesse sa voix sur une note discordante. Et en attendant d'avoir l'air et la chanson, Michelle a très longtemps déchanté. D'ailleurs, à peine Jean-Pierre Ferland commençait-il à composer Les femmes de 30 ans qu'elle s'étonnait déjà d'entendre tout le monde l'appeler Michel. «Depuis ma plus tendre enfance, mon cerveau me dit que je suis une femme, et j'ai dû lutter contre ça toute ma vie», confirme-t-elle.
À l'heure actuelle
, lorsqu'il est évident qu'un enfant n'est pas né dans le bon corps - ce qui se détecterait vers l'âge de quatre ans -, il a de fortes chances d'échapper au cauchemar existentiel du petit Michel. Un coup de fil à l'Association des transsexuels et transsexuelles du Québec m'a ainsi appris que près d'une dizaine de jeunes élèves évoluaient présentement incognito dans les cours d'école en n'affichant pas le sexe inscrit sur leur acte de naissance, et ce, grâce à un suivi médical et psychologique sérieux.
Si Michelle était venue au monde au cours de ce siècle-ci, elle n'aurait donc pas eu à se travestir dès l'adolescence pour permettre à son côté féminin de s'exprimer et elle n'aurait certainement pas été contrainte d'attendre quatre longues décennies avant d'entamer, en août 2007, sa lente transition d'homme à femme. «Même en 2010, la transsexualité est un demi-tabou, assure-t-elle. On a encore l'impression qu'elle concerne essentiellement des gais qui ne s'assument pas. Pourtant, la grande majorité des transsexuelles ont d'abord été des hétéros très virils qui, lorsqu'ils changent de sexe, restent aux femmes.»