• Envoyer
  • Imprimer
  • Favoris
  • Document user evaluation
    (1 personne)

Concilier travail et famille. Est-ce (vraiment) possible?

Est-il plus facile aujourd'hui d’élever une famille tout en étant performante au boulot?

Modifié le :
2010-01-08 11:23
Publié le :
2010-01-04 15:23
Par:
Karine Vilder

istockphoto

Conciliation travail et famille: un miracle?

Il y a deux ans, à 10 jours de la fin de mon dernier congé parental, on a officiellement aboli mon poste. Eh oui, loin des yeux, loin du coeur... Quoi qu'il en soit, j'ai rapidement été réaffectée à d'autres fonctions. Chanceuse?

Tout dépend du point de vue. Les garderies étant de véritables foyers d'infection, j'ai dû assimiler mes nouvelles tâches avec des cernes jusqu'au milieu des joues et un cerveau aussi efficace qu'un Commodore 64, remportant de ce fait la palme de l'employée la moins performante et la moins présente de l'année!

Au bout du rouleau, j'ai donc quitté mon emploi et opté pour le statut de pigiste, croyant candidement qu'un horaire flexible me permettrait de combiner plus aisément activités professionnelles et vie familiale. Erreur, grossière erreur! Entre les contrats à échéances serrées et les grippes-bronchiolitesotites- sinusites-conjonctivites-crises d'asthme et autres gastros qui se succèdent sans dérougir, j'en suis maintenant réduite à bosser durant les weekends. Alors, je vous le demande, quand trouverais-je le temps de m'occuper du ménage, des courses ou des parties de Cap'n Tock?

Voilà pourquoi j'ai proposé à la rédaction de Vita d'écrire un article sur la conciliation travail-famille. De un, parce que je suis convaincue que l'atteinte de ce noble objectif tient du miracle; de deux, parce que je pense aussi que je suis loin d'être la seule à le penser...

Publicité

istockphoto

La pilule: Une révolution du point de vue féministe

Tableau de la situation
Jusqu'au début des années 70, le problème ne se posait pas tellement.

À quelques exceptions près, nous, les femmes, consacrions effectivement le plus clair de nos journées à nous occuper de la marmaille et de la maison, abandonnant à notre tendre moitié rêves de réussite, patrons pointilleux, soucis d'argent et... crises cardiaques! Alors, qu'a-t-il bien pu se produire en cours de route pour que 40 % des mères d'enfants d'âge scolaire soient aujourd'hui à ce point stressées qu'elles devraient consulter un spécialiste*?

Allez, je vous donne un indice: aussi minuscule que soit cette innovation des sixties, elle a eu un impact énorme sur notre vie sexuelle. Vous avez deviné? Oui, il s'agit bel et bien de la pilule!

Bon, c'est vrai, je simplifie un peu les choses, mais n'empêche que dès l'instant où ce nouveau moyen de contraception a été légalisé (en 1969 au Canada), on s'est presque toutes ruées dessus. Fini, les trâlées de bébés!

Dès lors, histoire de se réaliser et de s'épanouir autrement, les femmes ont massivement investi le marché du travail. Et si, en 1976, nous n'étions que 41,4 % à gonfler les rangs des cols bleus ou blancs au Québec, ce taux a grimpé à 63,1 % en 1986, puis à 71,7 % en 1996, pour finalement atteindre 83,2 % l'an dernier**.

D'un point de vue strictement féministe, avouons que c'est une avancée extraordinaire, car on n'a même pas eu à faire flamber d'autres soutiens gorges sur la place publique pour brûler les étapes. Mais sur le plan pratico pratique, ce progrès constitue malgré tout un défi quotidien, l'équation travail famille se résumant concrètement à un problème d'arithmétique: en soustrayant du foyer traditionnel les deux membres du couple mobilisés par leur boulot, il ne reste plus personne pour assumer à temps plein les tâches domestiques, s'occuper des enfants (incluant les allers-retours entre l'école et l'aréna, la supervision des devoirs et les journées sacrifiées à jouer les garde malades) ou prodiguer des soins à un proche parent en perte d'autonomie.

*D'après un sondage réalisé par Léger Marketing auprès de 3004 personnes en novembre 2007.
**Taux d'activité des femmes de 25 à 54 ans au Québec.
Source:
Statistique Canada, Enquête sur la population active. Compilation: Institut de la statistique du Québec, Service des statistiques sociales et démographiques.

Publicité

istockphoto

Travail et famille: À quand une intervention de l'État

D'ailleurs, d'après une étude réalisée pour Desjardins Sécurité financière en mars 2007, 81 % des Canadiens avouent ramer constamment dans l'espoir d'atteindre un juste équilibre entre travail et vie personnelle... alors que seulement 27 % des répondants croient qu'il est possible d'y parvenir.

«En ce qui me concerne, je trouve qu'il faudrait 48 heures dans une journée pour y arriver, affirme Marie Godin*, une courtière d'assurance de 46 ans. J'ai deux ados en pleine crise d'identité à la maison, et ils m'en font tellement voir de toutes les couleurs que j'ai du mal à être "toute là" au travail. C'est dur à vivre, parce que ça me donne l'impression d'être à la fois une mauvaise mère et une mauvaise employée...»

Sans parler de la fatigue, de la démotivation et des risques accrus de dépression qui découlent d'une mauvaise gestion travail-famille. Sans oublier non plus la dégradation des rapports conjugaux et l'odieux sentiment de culpabilité qui surgit chaque fois qu'on ne consacre pas assez de temps à nos enfants ou à nos parents vieillissants.

«En tenant absolument à réussir dans chacune des sphères de notre vie, on finit forcément par s'embourber», explique Mélissa Lemieux, coach de vie professionnelle et auteure de l'agenda Mon bien-être au boulot (paru en 2008 aux Éditions de l'Homme). «Parmi toutes nos priorités, on oublie souvent de se ressourcer - ce qui constitue un bon moyen de laisser sortir la vapeur! Or, une femme qui ne le fait pas sera plus impatiente et perdra plus rapidement ses moyens, parce qu'il est impossible de concilier travail et famille sans stress.»

Les contrecoups de notre quotidien houleux se répercutent évidemment aussi sur l'entreprise qui nous emploie. Baisse de rendement, augmentation du taux d'absentéisme, roulement accru du personnel... Pas étonnant que le rapport Au travail! Canada 2007 de la société Watson Wyatt révèle que près de 25 % de la main-d'oeuvre est moins productive parce qu'elle n'a tout simplement pas l'énergie physique ou mentale requise pour effectuer son boulot. D'où l'urgence d'une intervention de l'État.

Publicité

istockphoto

Travail et famille: Repenser l'organisation du travail

Des mesures concrètes
«Les programmes de conciliation travail-famille s'adressent au parent qui se définit dans de nombreux rôles: celui de travailleur, de père ou de mère, et de proche aidant, souligne Audrey Gagnon, porte-parole du ministère de la Famille et des Aînés.

Les mesures mises en place par le Ministère prennent donc en considération ces multiples rôles. Par la suite, il appartient aux différents milieux interpelés de les intégrer dans leurs propres politiques. Depuis 2003, de concert avec ses nombreux partenaires, le Ministère a multiplié ses efforts pour favoriser la conciliation travail-famille, notamment avec des services de garde de qualité à contribution réduite et l'instauration du Régime québécois d'assurance parentale, un des plus beaux fleurons de la politique familiale québécoise avec son soutien souple et généreux.»

C'est vrai qu'on est très gâtées sur ce plan-là. «Les Canadiennes anglaises envient nos excellents services de garde à faible coût et, en ce qui concerne le congé parental, le Québec est vraiment favorisé par rapport au reste de l'Amérique du Nord», confirme Diane-Gabrielle Tremblay, professeure à la Télé-Université de l'UQAM et directrice d'un projet de recherche sur la conciliation emploi-famille et les temps sociaux.

«Du côté des entreprises, par contre, la conciliation travail-famille demeure un défi majeur, précise Mme Tremblay. À cause de la concurrence et des enjeux liés à la rentabilité, les compagnies ont tendance à réduire leurs coûts d'exploitation, notamment en coupant des postes.

Or, de manière générale, les tâches liées à ces postes ne sont pas éliminées, mais plutôt reportées sur les épaules d'autres employés. À cet égard, une enquête de Statistique Canada réalisée entre 1999 et 2005 révèle que de 20 % à 25 % des gens rapportent chaque semaine chez eux l'équivalent de six ou sept heures de boulot, dont seulement 5 % dans le cadre d'un programme de télétravail. Et avec la crise, cette tendance risque de s'accroître. Ce qu'on peut espérer, c'est que les entreprises en profitent pour repenser l'organisation du travail et offrir certains avantages compensatoires, car elles exigent beaucoup des employés.»

Publicité

istockphoto

Travail et famille: Des solutions!

Cela dit, comment établir des mesures équitables pour tout le monde quand on sait qu'il y a plus de 30 000 types d'emplois au Canada? Mystère et boule de gomme.

Car si une chargée de projet ou une avocate peut très bien travailler de chez elle à l'occasion, une technicienne dentaire ou une soudeuse peut difficilement en faire autant. En revanche, ces femmes-là pourraient bénéficier d'horaires flexibles. Et si les policières ou les salariées de certaines grosses entreprises ont accès à une garderie en milieu de travail, on parle ici d'exceptions.

«La société actuelle n'est pas encore à l'écoute de nos besoins, estime Louise Gingras*, une analyste en marketing de 59 ans. Pour pouvoir accorder plus de temps à ma mère, dit-elle, j'ai demandé en 2007 l'autorisation de travailler mes 37,5 heures hebdomadaires en quatre jours (ce qu'on appelle la semaine comprimée). Mais comme mes patrons ont peur de créer un précédent lourd de conséquences, ils retardent sans cesse leur décision...»

Tout un défi!
Pourtant, on gagnerait toutes (entreprises y compris!) à trouver un terrain d'entente. «À titre d'exemple, le télétravail est la demande numéro un des parents salariés, poursuit Diane- Gabrielle Tremblay. En plus d'avoir un effet immédiat sur la productivité des travailleurs, il contribue à augmenter leur motivation et à réduire le temps de déplacement, ce qui leur donne la possibilité de souffler un peu.

Mais pour l'instant, seulement 5 % des employeurs - tant au Québec qu'au Canada - offrent l'option du télétravail de manière officielle, même si 20 % des salariés rapportent du boulot à domicile sans se prévaloir d'un programme formel.»

«Comme moyen de conciliation, note la chercheuse, la flexibilité des horaires serait également fort appréciée, car en ayant la chance de commencer leur journée entre 7 h et 9 h, les parents disposeraient d'une plus grande marge de manoeuvre pour s'organiser lorsque les enfants sont malades. Quant à la semaine de travail comprimée, elle n'est pas encore très courante, même si elle donnerait un bon coup de main aux familles.

Publicité

istockphoto

Travail et famille: Ailleurs dans le monde et trucs

Les parents les plus gâtés de la planète habitent en Suède. D'emblée, ils ont droit à 16 mois de congé parental, qui peut être partagé entre la mère et le père.

Chez nos cousins français, la semaine de travail est officiellement passée de 39 heures à 35 heures pour tout le monde en 2002. Au Danemark, on peut se prévaloir gratuitement d'une aide ménagère lorsque le parent qui s'occupe des enfants est trop malade pour veiller sur eux.

Depuis mars 2000, le gouvernement irlandais fait de gros efforts pour pousser les employeurs à adopter des mesures qui épaulent les familles. S'ils sont parents de très jeunes enfants (6 ans et moins) ou d'un enfant handicapé, les travailleurs anglais peuvent bénéficier d'un horaire flexible, un droit qui leur a été accordé en avril 2003. Aux États-Unis et en Australie, par contre, on commence à peine à s'interroger sur le sens de l'expression «conciliation travail-famille»...

On veut des trucs!

Ne manquez pas de lire les meilleurs trucs de la coach de vie Mélissa Lemieux dans l'article Concilier travail et famille: Comment y arriver? publié sur notre site.

On peut aussi consulter Le guide québécois des soins à domicile de Philippe Said (Les Éditions Goélette, 20 $), le premier ouvrage à fournir une liste complète des services de dépannage pour les gens qui ont à leur charge un parent en perte d'autonomie.

La version originale de cet article a été publiée dans le numéro d'Octobre 2009 du magazine Vita .

Des commentaires?
Vous souhaitez réagir à cet article? N'hésitez pas à nous faire part de vos impressions dans l'encart Commentaires ci-dessous. Pour ce faire, vous devez être membre de la communauté Vita . Connectez-vous ici . Vous n'êtes pas membre et vous souhaitez le devenir? Vous n'avez qu'à vous inscrire en cliquant sur ce lien .

Retour à la Section Boulot

Publicité

Commentaires

  • Modza's avatar Modza a écrit :

    2010-02-15 4:02 PM

    Wow! Je me sors à peine de cette phase critique que nous vivons toutes (nouvelles maman) quand bébé et encore petit et que y’a pas de place en CPE (ou garderie à 7$). Quelle période pénible. C’est pour cette raison que j’ai mis ma vie sur pause lorsque j’ai eu mes deux garçons. Leurs 3 premières années de vie c’est fait avec leurs mamans. essentielles et ne pas mettre tout le fardeau sur papa. J’ai senti que je n’avais pas le choix de procéder de la sorte. Ce n’était pas juste pour moi, pas juste pour mon employeur et surtout pas juste pour mes enfants. Maintenant mes garçons sont à l’école et je suis un peu moins inquiète. J’ai fait un retour au travail à temps plein depuis 2 ans. Je dois dire toutefois que je suis essoufflée. Car après ma journée de travail et mon 45 min j’ai un autre boulot qui m’attend. Aller chercher les petits, donner une collation, préparer le souper, faire les devoir, partir une brasser de lavage, ramasser les traineries, préparer la liste d’épicerie, préparer les lunchs du lendemain, donner les bains, brosser les dents, lire l’histoire,…Travailler un 30 heure semaine...Un jour peut-être!
Laisser un commentaire

Les champs marqués avec * sont obligatoires.

Vous devez être connectée pour laisser un commentaire.

Envoyer à un ami

Les champs marqués d'un astérisque * sont obligatoires.

monVita

Inscrivez-vous pour commenter les articles, publier vos histoires ou encore, participer aux forums.


Bienvenue ! Se connecter , s'inscrire ou voir l'aperçu .

Publicité

Abonnement

Infolettre

Soyez au fait des nouveautés. Abonnez-vous dès maintenant.

Infolettre

Partenaires

Concours

")); "));