Règles de savoir-vivre et de politesse
Voulez-vous savoir ce qui me choquait le plus quand j'étais enceinte? C'était de constater - un trajet après l'autre - que personne ne me cédait spontanément sa place dans le métro. Ma bedaine proéminente engendrait même chez les passagers un comportement plutôt étrange: dès qu'ils la remarquaient, la plupart d'entre eux baissaient subitement la tête pour se perdre dans la contemplation de leurs chaussures.
Et lorsque j'ai commencé à me promener avec une poussette, j'en suis carrément arrivée à la conclusion que les bonnes manières étaient désormais aussi rares qu'un sourire sur une photo de passeport, un été sans festival ou un médecin de famille au Québec en 2009.
Mais vous ne connaissez pas encore la meilleure: avez-vous déjà entendu dire que le fait de tenir la porte à quelqu'un augmentait les risques de tendinite? Eh bien moi, oui! Qui plus est, cette brillante affirmation était énoncée par un jeune type dont le t-shirt noir moulant révélait un tas de muscles aussi gonflés que lui! J'ai également vu quantité d'hommes se faufiler devant moi pendant que je me débattais en compagnie de fiston avec la porte d'un commerce, sans parler de la fois où je me suis fait engueuler par une ado parce que je bloquais l'entrée d'une boulangerie avec ma poussette double. Ce jour-là, excédée, je ne me suis pas gênée pour exploser. Mais au lieu d'en tirer une quelconque satisfaction, j'ai eu la tremblote pendant des heures, secouée parce trop-plein d'émotion...
"Ah oui? Ah bon!"
«La colère est souvent mauvaise conseillère» assure Denyse Bisson, propriétaire du Remarquable, une entreprise de Québec spécialisée en étiquette. «Idéalement, dit-elle, on devrait toujours attendre que notre réaction s'apaise avant de parler, car plutôt que de nous faire du bien, ce genre de défoulement nous fait perdre le peu d'énergie qui nous reste. Ça me fait d'ailleurs penser à une histoire, celle de deux femmes sur le point d'accoucher. L'une dit à l'autre:
- Si vous saviez à quel point mon mari m'aime! À la naissance de notre premier enfant, il m'a offert un manteau de zibeline.
- Ah oui? Ah bon! répond l'autre.
- Au deuxième enfant, j'ai reçu une rivière de diamants puis, au troisième, il m'a emmenée faire le tour du monde! Et vous?
- Moi, mon mari m'a offert un cours de savoir-vivre. J'y ai entre autres appris à dire "Ah oui? Ah bon!" au lieu de"Va ch...!"
J'aime bien cette histoire, poursuit la pro de l'étiquette, parce qu'elle montre qu'on peut conserver sa dignité d'adulte mature sans se laisser dominer par ses émotions - et ce, même si la situation est infecte. À 40 ans passés, on a en effet la répartie facile et plus on vieillit, plus on est portée à se montrer critique.» Reste à savoir comment réagir intelligemment - sans se transformer en chipie! - chaque fois qu'on tombe sur un impoli. Démonstration en huit cas précis.