Mûres pour le plaisir
Mûres pour le plaisir
Une bonne nouvelle, quoi! Dommage qu'on vive dans une société où le culte de la «chair fraiche» est si omniprésent dans l'esprit des gens qu'il devient presque indécent d'imaginer nos grands-parents en train de copuler joyeusement. Comme si la sexualité était réservée aux non-ménopausées! D'ailleurs, passé un certain âge, bon nombre de femmes n'osent pas avouer qu'elles sont toujours friandes de sexe, craignant de passer pour des «salopes» ou des «perverses» (comme en témoignent nombre de sites répertoriés sur Google).
«Globalement, les stéréotypes sociaux sont de plus en plus présents quand on vieillit, souligne Jocelyne Robert. Ça rend difficile le passage vers la ménopause et ça peut avoir un impact sur la libido à cause du regard des autres - surtout si, en plus, on pense que la séduction est une affaire de jeunes.»
Pourtant, plus on avance en âge, plus on a tendance à s'affranchir de bien des préoccupations futiles, du genre «il ne faut pas que j'oublie de rentrer le ventre» ou «qu'est-ce que mon chum va dire s'il voit mes vergetures?». Jocelyne Robert rencontre souvent des femmes qui s'abandonnent peu dans leur vie sexuelle: «Elles sont très préoccupées par leur corps et le besoin de correspondre à un modèle féminin stéréotypé, ce qui peut leur nuire. Car pour triper sexuellement, il faut aimer son corps. Sinon, il est plus difficile de s'ouvrir à l'érotisme. Mais vers la fin de la cinquantaine, on est moins axées sur le paraitre. On a accepté le plaisir de vieillir et on ne joue plus de game . C'est pour ça qu'on parle de femmes de 60 ans un peu débridées sexuellement. Elles ressentent une frénésie de vivre pleinement parce que le temps presse, et ça concerne aussi la sexualité. Je le constate autour de moi chez les femmes de 58 à 62 ans.»
Cependant, comme peu d'entre elles osent en parler ouvertement, j'ai eu un mal fou à trouver une sexagénaire qui assume ses désirs sans trop rougir. «C'est vrai que la sexualité des femmes mures semble être encore un sujet tabou», constate Irène, 62 ans, ex-prof de français. «Comme si on ne faisait que dormir dans un lit dès qu'on a les cheveux gris! Ben voyons, il faut arrêter de se mettre des œillères et regarder la vérité en face: faire l'amour, c'est bon à tout âge. Je mets juste un peu plus de temps avant d'être lubrifiée, mais j'y arrive grâce à mon partenaire, qui sait exactement quels gestes poser pour m'exciter. En fait, c'est ça la grande différence: comme je ne m'en fais plus avec mon apparence, je m'abandonne totalement au plaisir. Et puis, l'appétit vient en mangeant. Alors, comme Angèle Arsenault, moi, je mange! Parce que je me dis qu'on ne sait jamais de quoi demain sera fait.»