Le poids de l'éducation
Le poids de l'éducation
Le sentiment de malaise est sans aucun doute celui qui prédomine parmi les témoignages des femmes interviewées. «Quand j'ai été embauchée, on m'a promis d'augmenter mon salaire au bout de trois mois, raconte Sylvie Sirois, 46 ans, relationniste dans le milieu de la mode. Or, les trois mois ont passé, et personne n'en parlait plus... Je l'ai donc rappelé à mon patron, et il m'a dit qu'il m'en donnerait des nouvelles sous peu. Je n'étais pas très à l'aise d'aborder le sujet, même si je sais qu'il me fallait le faire pour obtenir ce qui avait été convenu au départ.»
Mais qu'est-ce qui explique cette réticence, voire cette résistance des femmes à réclamer leur dû? «Je crois que, dès leur enfance, les femmes de notre génération se sont fait dire que ce n'est pas bien de parler d'argent, qu'il ne faut pas en demander, qu'on doit se contenter de ce qu'on nous donne», affirme France Bonneau, 43 ans, directrice des communications au Barreau du Québec. Et il s'agit selon elle d'une tendance lourde, même quand on n'est pas en situation de négociation. «Lorsque, après une évaluation, mon employeur m'accordait une augmentation de salaire, je stressais en me disant qu'il faudrait que je travaille encore plus fort! J'avais du mal à me mettre dans la tête qu'on bonifiait ma rémunération pour souligner le travail que j'avais déjà accompli.»
Comme quoi les réflexes ont la vie dure! Même pour une femme d'expérience comme France, qui dit pourtant avoir fait d'énormes progrès grâce aux conseils de son mari - un pro des ressources humaines qui la coache à l'occasion. En fait, les femmes hésitent beaucoup avant d'entreprendre une négociation salariale, car elles pensent que c'est mal vu. «Elles ont peur d'être rejetées, de nuire à leur relation avec leur employeur, alors que les hommes, eux, voient ça comme une simple question d'affaires», souligne Lucie Dubé, conseillère en transition et gestion de carrière à l'Association Midi-Quarante, un organisme lavallois voué à l'employabilité des personnes de 40 ans et plus. Mme Dubé précise toutefois que les choses commencent à bouger. «Les nouvelles générations sont plus conscientes de ce qu'elles valent et négocient de mieux en mieux», constate-t-elle, encouragée par cette récente évolution.