Du bonheur à Kigali
À mon retour en Alberta, j'ai embauché et formé ma remplaçante, je me suis départie de mes biens - j'en ai versé, des larmes, en faisant le tri! - et je me suis envolée avec deux valises, mes économies et des fonds de 5000 $ pour financer les projets d'Ubuntu Edmonton. Je suis arrivée à Kigali grippée et morte de trac. Que faire? Par où commencer? Au bout de cinq jours, je louais la maison qui deviendrait le centre communautaire. Un mois plus tard, j'y emménageais. Le mois suivant, le Centre César ouvrait officiellement ses portes.
Là-bas, j'ai mis sur pied une banque alimentaire. J'ai engagé une formatrice pour enseigner le tricot et la couture aux mamans, une autre pour l'artisanat. Et puis j'ai décroché un contrat de confection d'uniformes pour un collège de la région. C'était parti. Le Centre César reçoit maintenant près de 85 femmes par jour. Elles viennent pour s'approvisionner en nourriture, se faire soigner à la clinique médicale, fabriquer des produits d'artisanat, travailler à l'atelier de couture ou suivre une formation. On a ouvert une garderie que fréquentent 30 petits, mais il en reste encore autant dans la rue. Un programme de parrainage permet à plus de 175 enfants d'aller en classe. Et depuis peu, on offre des cours de mécanique automobile aux jeunes sans emploi. En fait, j'ai tant de projets que le centre est vite devenu trop petit. L'an dernier, on déménageait dans de plus grands locaux qui ne suffisent déjà plus... Grâce à une mécène, on construit maintenant un nouvel édifice en plein cœur de Kimironko.
Je viens au Canada deux fois par année en tournée de présentation pour recueillir des fonds, vendre nos produits d'artisanat et, bien sûr, voir les miens. Mes petits-enfants me manquent. C'est mon seul regret. Je n'ai jamais été aussi heureuse. Je me réalise, je fais des choses que je ne pensais pas être capable de faire. Et je vis une grande histoire d'amour avec 150 femmes qui travaillent, qui vivent et qui rêvent ensemble.